La Moins Bonne de tes copines

Ce jour où je n’ai pas choppé le Covid

Vendredi 8 avril 2022. Mes parents ont été testés positifs au Covid alors même que nous avions passé le week-end précédent en famille à nous jeter les pions du Monopoly à la gueule, à échanger nos verres et à piocher ensemble dans les mêmes paquets de chips. J’en étais certaine : tout était de la faute de mon neveu. Il faut dire que manger le nez des gens, leur mettre les doigts dans la bouche et leur lécher l’oreille alors que le virus compose 75 % de ton corps, ce n’est pas une bonne méthode pour ne pas le propager. Alors, forcément, après ces 48 heures tous ensemble, mes parents étaient positifs. Et, par défaut, je pensais l’être.

Ce vendredi 8 avril 2022, les premiers symptômes sont apparus.

Migraine, mal de gorge et sinus enflammés sont rapidement devenus mon quotidien ; même si, à mon grand regret, ils le sont assez souvent. #fuckingpolypes. Parce que oui, j’ai des polypes, et j’utilise cette chronique pour vous en parler, dans cette parenthèse que vous devez m’autoriser. Déjà, parce que je me traîne cette merde depuis presque trois ans. Trois ans avec des boules de chair dégueulasses qui poussent dans mon pif, qui m’empêchent de respirer, qui ont détruit mon odorat, qui me font ronfler, qui me causent des insomnies et qui me font passer un SMIC dans des mouchoirs qui ressortent intacts car, MERDE, j’ai même pas de morve.

Mais surtout, parce que les polypes s’appellent polypes. Comment voulez-vous que j’arrive à séduire un homme lorsque ma seule maladie chronique qui pourrait lui faire pitié se nomme « polypes » ?! Il y a quelques semaines, j’ai eu un date. Dans le bar, la serveuse m’a proposé un cocktail et m’a demandé si j’aimais la goyave. J’ai eu le malheur de lui répondre que je n’avais pas de goût à cause de polypes nasaux, le tout sous le regard de mon crush. Juste avant qu’il s’en aille. Les polypes sont des putes. Et j’aimerais que nous démocratisions ensemble ce hashtag : #fuckingpolypes. Merci.

(Cela étant dit, et parce que ces nouvelles n’ont pas que pour but de diffuser un maximum d’insultes en un minimum de temps, je tiens tout de même à vous partager quelques astuces que j’ai trouvées pour les soulager, faute de pouvoir les faire complètement disparaître. Premièrement, le fameux cataplasme d’argile verte. Je vous jure, ça fonctionne. Deuxièmement, des inhalations eau chaude/tea tree quotidienne. Attention, ça débouche, et pas que les polypes. C’était mes deux conseils, en tant que meuf qui a fait un an de médecine. Et oui, Mesdames, je ne suis pas qu’un physique.)

Technique pour les polypes. TMTC

Cette fois, c’était pas que les fucking polypes. Je le sentais bien. Je me suis donc aventurée sous la pluie pour faire un test PCR. Le fameux. Après une pénétration de ma narine par ce qui s’apparentait à un micropénis à en croire sa surprenante discrétion, j’avais enfin ma réponse : j’étais négative. Pour être honnête, j’ai relu le résultat deux fois, pour tenter d’y voir un positif. J’avais une soirée le lendemain en plein centre de Paris, le genre où tu retrouves des collègues d’une autre vie que tu n’as pas recroisés depuis deux ans, dont tu te souviens à peine du prénom et à qui tu dois raconter ta vie, tellement plus géniale que la leur. Mais je n’ai pas pu y échapper. Tout s’est d’ailleurs passé comme je l’avais imaginé. Certes, en ajoutant le côté « Je les aime bien quand même ». Mais tout le reste y était.

Et puis, le vrai problème de cette soirée, c’était pas eux. C’était moi. Parce que même avec l’angine, le Covid, une otite ou la chiasse, je mets l’ambiance. Je me suis donc retrouvée, jusqu’à deux heures du mat, la clope festive au bec et le verre de champagne à la main à hurler sur le dancefloor. Certes, j’ai très vite troqué tout ça contre une pastille à la menthe et un verre de Coca, mais le mal était déjà fait : j’avais permis à la grippe de s’installer confortablement. Nous avons fait connaissance le lendemain matin, après une nuit mouvementée, comme un inconnu que j’aurais ramené à la maison et qui aurait flirté avec mes insomnies. La grippe avait fait frissonner chacun de mes membres, trempé mes draps et m’avait fait monter en température. Presque aussi puissante qu’un orgasme, si on oublie toute la partie douloureuse.

Parce que le dimanche, j’avais simplement envie de crever. Je n’arrivais plus à rien. Ni respirer, ni avaler ma salive, ni regarder la lumière, ni même me lever du lit. J’étais esclave de mon propre corps. Et ce n’était que le début.

Petit à petit, jour après jour, j’ai glissé vers la vraie maladie. Du genre que je n’avais pas eu depuis longtemps et qui te pousse à te demander : pourquoi on tombe malade, d’abord ? J’ai commencé à chercher sur Google avant de me rappeler que j’en avais strictement rien à foutre, simplement car cela ne changerait absolument pas mon état. Je continuerais de crever au fond de mon lit. Et puis, moi, je vis toute seule. Officiellement avec GG le borgne, mais, scoop, dans ces moments — comme dans beaucoup, d’ailleurs —, il ne sert pas à grand-chose. Oui, je l’aime. Mais il faut être honnête : son utilité est vraiment minime. J’ai donc dû survivre par mes propres moyens. Et le pire, c’est que je ne pouvais même pas me plaindre… car ce n’était pas le Covid. Autour de moi, ils l’avaient tous. Mes amis, mes parents, les voisins ou la boulangère. Ils l’avaient VRAIMENT tous. Et quand bien même leurs états étaient très convenables, voire complètement dérisoires par rapport au mien, c’était leurs cas qui importaient, car c’était le Covid.exaltation de leur liberté les traversait tous.

Tous comparaient leurs symptômes, leurs convalescences, leurs PCR et leurs diagnostics. Ensemble, ils se retrouvaient, se jaugeaient, vérifiaient la véracité des faits et échangeaient sur leurs expériences. Ils faisaient partie de « ces gens qui ont vécu le Covid », me rabaissant à mon statut de grippée. J’étais exclue, bannie des discussions, incapable de choper quoi que ce soit à l’exception d’un rhume. Moi aussi, je rêvais de pouvoir répéter combien la phase de récupération est longue et je priais pour pouvoir faire mille stories pour me plaindre des vaccins qui ne sont pas efficaces alors même que je n’y connais rien. Et c’est à cet instant que j’ai compris. Le problème, c’était le test.

Je suis directement repartie au laboratoire, j’ai ordonné qu’on me viole le nez immédiatement et j’ai attendu le résultat, persuadée qu’il y avait eu une erreur. Et pourtant, rien. Aucune erreur. Le test était encore négatif. Mais, sans même le savoir, l’infirmière m’a offert mon ticket vers la compassion que j’attendais, lorsque, face à ma surprise, elle m’a glissé :

— Vous savez, vous êtes sans doute un faux négatif.

Faux négatif ? Faux négatif ! Il était donc possible d’être un faux négatif.

Que voulait-elle me dire ? Que mes narines gonflées aux polypes bloquaient l’accès au coton-tige ? Toujours ces fucking polypes ! Face à ses dires, tout s’est éclairé. Outre le fait que j’apprenais qu’aucune partie de mon corps n’acceptait la pénétration, j’ai surtout compris que j’étais ⭐ unique ⭐. J’étais un faux négatif.

Devant moi, un champ infini de discussions, de débats, de réflexions, de complotisme s’ouvrait à moi. Je m’imaginais déjà sur les réseaux à critiquer ce système qui ne fonctionne pas, au milieu des repas à détailler mon état alors que j’étais négative, lors des apéros entre copains à leur répéter que « si, c’est possible, la preuve ». J’étais l’élue. Rapidement, mon téléphone a sonné. J’ai été invitée à une émission de télé, trois émissions de radio, six journaux nationaux et une compétition de pétanque. Parce que, je cite, « les boules, vous avez dû les avoir lorsqu’on vous a annoncé que vous étiez négative alors que vous aviez le Covid ». On me demandait partout, même aux États-Unis. En trois jours, j’ai rencontré plus de monde qu’en un an et j’ai voyagé dans six continents, alors qu’il n’y en a que cinq (oui, j’ai eu un doute, j’ai googlisé ; y a un problème ?). J’ai mangé avec Obama et conseillé le ministre de la Santé sur sa stratégie. Je me suis trouvée à la table du conseil scientifique et j’ai écrit un livre dont le titre est Positif et négatif : la dualité d’un corps et qui s’est vendu à plus de 100 000 exemplaires. Trois jours de folie. Avant le quatrième.

Dans mon lit, la goutte de fièvre sur le front, j’ai ouvert mes paupières après quatre jours de coma dans mes draps toujours trempés par ma propre sueur. Sur mon téléphone, un message de ma mère : « Papa et moi allons mieux. Surprenant que toi aussi tu sois malade et pourtant négative. Cela dit, ça doit être un faux négatif. Il y en a tellement. »

J’ai relu la dernière phrase, en boucle. « Il y en a tellement. » Il y en a tellement ? Je n’étais donc pas la seule. Mon rêve de célébrité s’est évaporé avec la fièvre, et ma réalité a pris le nom d’hallucination.

Tout était faux (mais du coup, sans doute pas négatif), ce jour où je n’ai pas chopé le Covid.

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53 réponses

  1. Mathilde Lesimple dit :

    Mon dieu quelle imagination ! On s’ennuie jamais avec toi !!!
    Merci pour cette petite nouvelle ! Je m’y suis bien retrouvée puisque je traîne une sinusite depuis quelques semaines avec que des tests négatifs !!!

  2. Angelique Toux dit :

    Coucou ! Perso je ne me fais plus tester. Je vois pas ce que ça change. Grippe ou covid t’es mal quand même que le test soit positif ou négatif.

  3. Delphine GUILLEMAIN dit :

    Hihihi bah voilà, du délire qui n’en n’est peut être pas 😁😘

  4. Lilirenarde dit :

    Ahahah je m’y retrouve tellement ! Mars 2021, je tombe malade… tout me pousse à penser Covid mais mon test est négatif 72h plus tard ma mère me dit « t’as refilé ta crève à ton père » le médecin lui fait faire un PCR, positif variant anglais. Là tout s’enchaîne, on le refait faire un PCR ainsi qu’à ma mère et ma soeur. Elles positives, moi toujours négatives mais plus malade que les trois réunis. Je me retrouve sous inhalateur tant ma respiration prend cher, tous les medecin sont au clairs pour le dire que j’ai le Covid mais les test ne VEULENT PAS de moi ! J’en ai fait 5 !!! 5 négatifs !!
    On aura jamais eu le fin mot de cette histoire mais en novembre dernier, donc 8 mois après, je commence à ressentir EXACTEMENT les mêmes premiers symptômes, labo : POSITIVE variant Delta.
    Je l’ai ensuite à nouveau contracté 4 mois après en mars dernier avec un nouveau variant encore et le positif ne s’est pas fait désirer.

    Alors pourquoi cette fois en mars 2021 la science avait décidé de me rejeter je ne le saurais jamais mais je me suis cru unique moi aussi 😂😂😂

    Merci pour cette nouvelle qui m’a mis le sourire (car pr contre depuis mars dernier je suis en Covid long et je vais devoir me faire hospitaliser prochainement car j’ai toujours une infection que l’on arrive pas à localiser 🙊) Foutu Covid !!!

  5. Coralie dit :

    Non mais je te comprend tellement pour les polypes, moi aussi j’en ai. Mais moi elles ne retiennent pas la morve et j’ai les narines tellement grosses que j’ai pas le temps de les intercepter des fois elles tombent avant même que j’ai pu mettre un mouchoir ahahahah
    Merci pour ce concours au passage 😘

  6. Lena.H dit :

    Ahah j’adore, je me suis bien marrée une fois de plus.

  7. Maud dit :

    « Me rabaissant à mon statut de simple grippée »
    … voilà les mots exacts de ce que j’ai ressenti ! merci à toi

  8. Maria Gnaedig dit :

    Moi je t’adore ! Suis fan ! Tu me fais trop rire ! Et surtout j’espère gagner les livres dédicaces même si je les ai déjà lu et relu 😜 merci encore pour cette histoire 😜😆😆

  9. Carpentier dit :

    Toujours aussi bien ces nouvelles !! Pour l’heure de la mise en ligne peu m’importe tant qu’on les reçois !! 😘

  10. Coco dit :

    Tu as failli être l élue !! Je comprends ta déception … !! Quelle dommage mais en même temps tu es notre «  élue » à nous .. crois moi .
    J ai encore bien rigolé comme tous les jeudi .. merci et au passage je veux bien un livre dédicacé et tous les trucs qui vont avec .. oui ok je sais j abuse mais j assume !
    Allez à très vite !!

  11. Coralie dit :

    ⭐ Merci pour cette nouvelle !

    J’adore recevoir mon petit mail en pleine réunion qui annonce que ma pause va être sympa !

    Quelle déception que tu ne dois pas l’élue, dans tous les cas tu es unique ça c’est sûr 😊
    Bonne journée 😘

    Coco (l’élue des coco)

  12. Noemie dit :

    Quel bonheur de te lire !! C’est kiffant ! Tu peux parler polypes, petits cul, covid ou tongs même, balec, ma pause n’en sera que plus drole !
    Merciiiiii !

  13. Lisa dit :

    très mauvaise idée de lire ton histoire au boulot …mdr
    géniale, j’ai adoré 😉

  14. Margaux dit :

    Encore un super moment passé à lire ta nouvelle. Je ne pensais pas dire ça un jour, mais vive le jeudi !! 🥰

  15. Kassandra Deval dit :

    Wouuuah je viens de m’abonner pour pouvoir lire tes histoires chaque jeudis et franchement je viens de lire celle ci a une vitesse folle ! On est tellement à fond quand on lis tes histoires ! C’est super génial comme concept ! Bravo !

  16. Jennifer Lenet dit :

    Comme d’habitude excellente 🤩 vivement jeudi prochain ♥️

  17. Océane Lefevre dit :

    Aaaah j’adore lire tes nouvelles! J’ai toujours le même rituel, presque allongé sur mon canapé avec un petit café et mon chat sur les genoux pour déguster cette petite lecture 😍! C’est vraiment mon petit kiff a moi! Continue comme ca J’ADORE! 😘

  18. priscille tauchnitz dit :

    J’ai chopé le Covid en février il m’a couché pendant 5 jours ce fourbre et un mois et demi après j’ai chopé une gripette je me teste et rebelote positive !!! Et là je suis sûr que c’était un faux positif ou bien la positivité de la dernière fois car cela a durer 48h enfin bon on pourrait écrire un livre sur ce fameux Covid !!!
    Merci de me faire sourire à chaque nouvelle tant attendu !!

  19. juju dit :

    Hello Nono, je viens juste de lire ta chronique (avec un peu de retard). J’adore comme les précédentes. Merci de nous faire rire au quotidien , vivement le mois prochain pour le 3ème 🙂

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