Ce jour où j’ai regardé du porno
Lundi 10 janvier 2022. Ou peut-être mardi 11 janvier 2022. Une semaine en janvier. Quelques jours avant, j’avais acheté LE sex-toy qui m’a fait découvrir ma sexualité. Ça, je vous l’ai déjà raconté. Mais ce cadeau s’accompagnait d’une malédiction, d’une obsession qui allait gâcher mes nuits, de pulsions incontrôlables qui allaient faire de moi un animal : le retour de ma libido.
Celle-là, je l’avais oubliée. Les papillons dans le vagin, les spasmes qui te crispent et les pensées obscènes. Toute la journée. Je devenais addict au cul. Et si mon imaginaire est celui que vous connaissez, il avait pourtant ses limites. C’est à ce moment qu’il est intervenu : le porno.
Moi, j’avais jamais osé me lancer. Comme une honte, un malaise, une abomination, un truc inaccessible. Le porno, dans ma tête, c’était mal. Et puis, je l’avais surtout sacralisé. Ado, je n’en avais jamais regardé. Mes seules références étaient Spike qui couche avec Buffy dans un appartement délabré ou Jafar dans Aladdin qui soumet Jasmine en l’hypnotisant. Me jugez pas, j’ai toujours eu un faible pour les badboys, même ceux qui n’existent pas vraiment.
C’était avec ces images que mon imaginaire sexuel s’était construit. Bien loin du porno dont le titre peut être « Il éjacule entre ses seins et lui fourre le cul » — même si, j’en suis sûre, Jafar aurait adoré l’idée.
Il y a quelques mois, donc, lorsque j’ai décidé de m’initier au porno, j’avais une appréhension, couplée à l’excitation de la découverte. Je me suis installée dans mon lit prête à me faire l’amour, ayant pris soin de cacher la caméra de mon ordinateur et de passer ma navigation en privé. Oui, ça ne sert sans doute à rien. Mais dans ma tête, la mafia russe pouvait me filmer, me faire chanter, finir par vendre des vidéos prises à mon insu à la mafia italienne qui, elle, me demanderait une rançon avant de diffuser mes sextapes et de ruiner ma carrière. Je vous voyais déjà en train de chercher sur Google : « Lamoinsbonnedetescopines se termine sur une vidéo de baby-sitter mal élevé ». Je vous le répète, ne me jugez pas.
J’avais donc pris toutes les mesures nécessaires pour faire de cette première expérience un bon moment. J’ai tapé « porno » dans la barre de recherches, me suis dirigée vers le site le plus populaire et j’ai donc sur atterri YouPorn. Et là, j’étais paumée. Je n’y connaissais rien, et plus encore, je n’avais aucune idée de ce qui pouvait me plaire. Alors, j’ai découvert. J’ai cliqué sur la première vidéo, un soft probablement, et je m’en suis voulu. Je m’en suis voulu de ne pas avoir profité de cette joie intense avant. Comment avais-je pu me flageller autant pour me priver de ce plaisir ? Parce que oui, c’était un plaisir de regarder ce porno, de m’installer confortablement et, pendant plusieurs minutes, de ne penser à rien à part me faire du bien.
Les jours qui ont suivi, je n’ai pas cessé. Une fois, deux fois, parfois trois fois par jour, au point de m’inquiéter. Et si je développais une addiction ? Je voulais tout découvrir, même les côtés les plus sombres, sans une once de crainte. Et si j’aimais ça ? Bonne nouvelle, je crois qu’à l’exception des stepfathers et des docteurs un peu pervers, mes désirs restent softs. Je devenais une pro de YouPorn, même si je continuais à avoir un peu honte. Est-ce que c’est normal de regarder du porno ? D’en avoir envie ? De fantasmer sur des corps que je n’aimerais sans doute pas en réalité ? Sur des situations que je ne vivrai jamais ? C’était donc ça, le porno ?
J’avais pas mal de questions, et personne à part moi-même pour y répondre. Bien sûr, j’en ai discuté avec des amies, mais nous avons gardé une part de mystère. C’est faux. On s’est donné tous les détails, de nos préférences de mises en scène à nos acteurs favoris. Mais cela étant dit, mes questions restaient sans réponses et, surtout, empreintes de mes propres jugements.
Et rien ne s’est arrangé. Alors que je me masturbais tous les jours, j’ai reçu un mail. LE mail. Celui qui m’informait que j’étais accusée de pédopornographie, de visionnage de vidéos à caractère sexuel interdites, de pratiques inadaptées et qui me reprochait d’être la pire des putes. En gros.
J’ai paniqué. Directement, j’ai envoyé un message à un ami, comme dans Qui veut gagner des millions ?, version Qui veut pas finir en prison ?. Pendant dix interminables minutes, je me suis affolée et, surtout, je me suis justifiée. J’ai écrit un long mail en m’excusant, en expliquant que j’avais regardé du porno mais que je ne recommencerais plus, que j’étais une sombre merde qui se chiait dessus. Et puis, j’en ai parlé avec vous en story. J’ai avoué pour la première fois publiquement que je regardais du porno (et que j’allais probablement finir en taule pour ça). Jusqu’au moment où, quelques secondes après, mon ami m’a répondu. Je cite : « Nono, c’est une arnaque. »
Bien sûr que c’était une arnaque. Comment avais-je pu ne pas le deviner ? J’ai compris à quel point j’avais diabolisé la masturbation pour réagir si vite, sans distance, sans prise de recul. Mais cette arnaque a été le tournant de ma relation avec le porno. Car face à mes stories, j’ai reçu des centaines de témoignages. Vos histoires, votre affection pour ces vidéos, vos confessions. Tout est devenu évident : 80 % des personnes (et je dirais même des femmes) en regardent. Et il n’y a aucune honte à ça. Mieux : vous m’avez partagé vos découvertes, vos sites coup de cœur et vos petits plaisirs cachés. Tout a été désacralisé, grâce à vous. J’ai réalisé que j’étais comme tout le monde, que certaines se masturbaient six fois par jour là où d’autres ne le faisaient jamais ; que certaines pratiquaient ça en couple et d’autres célibataires ; que certaines aimaient le gore et d’autres l’érotique. J’ai réalisé qu’il n’y avait aucune règle et qu’il ne devait pas y en avoir (enfin… tu comprends). J’ai réalisé que les vidéos pornos devaient nous ouvrir à nous et non pas nous enfermer.
À la suite de ça, j’ai enfin pris le pouvoir de ma sexualité et de ma libido.
Non, je n’ai pas à avoir honte d’aimer jouir, de me masturber dans mon lit parfois plusieurs fois par jour, de jouir en regardant un porno même s’il arrive que les mains des filles soient ligotées alors que dans la vie, le mec pourrait se pendre avec ces cordes avant d’imaginer les mettre autour de mes bras. Parce que j’ai compris que c’était aussi ça, la force du porno : laisser libre cours à ses fantasmes et les faire vivre de manière saine. (Non pas que de se faire ligoter ne soit pas sain, TMTC chacun fait ce qu’il veut avec son cul. Ou sa chatte. Ou ses poignets, en l’occurrence.)
Aujourd’hui, presque six mois après, je n’ai pas changé mes nouvelles habitudes. Je regarde du porno presque tous les jours. Je n’ai pas honte de le dire. Car en faisant ça, j’apprends à m’aimer, à découvrir mon corps et à avoir du plaisir. Je n’ai jamais eu autant envie de prendre soin de moi, de rencontrer de nouvelles personnes et de laisser une chance aux hommes depuis que je squatte YouPorn et que je me masturbe devant. J’accepte d’aimer, de regarder deux fois la même vidéo parce que j’y passe tellement de temps que j’ai fini par les avoir toutes vues, de connaître le prénom des acteurs et de savoir de qui il s’agit même quand il a le visage flouté. Et surtout, j’accepte que le porno ne soit qu’une porte vers d’autres chemins plus importants : ceux de la réalité. Car en six mois, ma sexualité n’a jamais été aussi épanouie et si tout n’est que fantasmes, ces vidéos m’ont permis de me reconnecter à la vraie vie. C’est ce que j’ai découvert, depuis ce jour où j’ai regardé du porno.
6 réponses
Cette nouvelle est vraiment génial et bien écrite pour les personnes qui peuvent ce poser des questions ou avoir honte !
Je suis une femme marié avec une vie sexuelle épanouie et pourtant je regarde du porno plusieurs fois par semaine seule et je me masturbe dans aucun problème !
On a la chance de pouvoir profiter librement de nos corps, profitons en 💪🏻💪🏻
😂 Youporn également. Mon homme est au courant lui c’est pornhub. Chacun fait ce qui veux 💪
Pour être heureux , il faut assumer ses choix ! 🥰
Il n’y a pas de mal à se faire plaisir … 😅
Bien d’accord !
52 ans et adepte du porno. Mon conjoint déteste et bien moi j adore et je n hesite pas a me faire plaisir assez souvent 🎊🎊
Tu as bien raison !!