La Moins Bonne de tes copines

Ce jour où j’étais en vacances avec un couple

bkg B Club

Lundi 7 août. Départ en vacances. Si on considère que quitter son domicile pour aller à deux heures de chez soi, en continuant de répondre aux mails, en envoyant des commandes, en gérant un magazine et en écrivant un blog, c’est des vacances. Mais je partais. Au moins ailleurs.

Parce que, je ne le cache pas, ce mois d’août est un sacré enculé.

Alors que, depuis toujours, c’est l’un de mes favoris. J’ai pour habitude de rejoindre mes amis et ma famille en août. Certains préfèrent juillet. Sachez que nous, les vacanciers d’août, on ne vous comprend pas. Juillet, c’est pas un bon mois de vacances d’été. Août, c’est nickel. À l’exception de cette année. Cet été 2023, il a un goût amer. Ou, autrement dit, une saveur de merde. Et quand je dis « merde », je pense pas au caca parfait que tu déposes en deux minutes sur les chiottes en matant mes stories (fais pas genre ; je sais). Je pense au caca qui te détruit l’intestin, défonce le trône avec un jet en spray et t’oblige à foncer sous la douche tant tu t’en es mis plein le cul. La vraie merde. Mon mois d’août, il a commencé comme ça.

Déjà, je me suis séparée d’un homme qui je fréquentais depuis des plus d’un an, que j’aimais, qui m’aimait probablement à sa manière et qui, finalement, n’était même pas mon mec. C’était tout le sujet, d’ailleurs. Mais pas celui d’aujourd’hui.

Et puis, il fait un temps de merde. Un genre d’octobre, avec de la pluie à foison, de l’orage, des journées sous la couette à chialer, à prendre des kilos avec de la glace et à éviter de monter les marches pour ne pas se fatiguer.

Alors, quand j’ai passé cette première semaine de déprime, durant laquelle même ma psy m’a quittée, je me suis finalement décidée à me bouger le cul. J’ai tapoté un texto à ma meilleure amie, lui ai proposé de trouver un gite loin de tout, d’emmener nos chiens et d’oublier nos merdes. (En réalité, les choses ne se sont pas du tout passées comme ça ; à dire vrai, on avait prévu ces « vacances » depuis trois mois, réservé le Airbnb depuis deux mois et préparé nos valises depuis un mois. Mais, pour romancer mes histoires, nous partirons sur un autre scénario. Merci.) Elle, elle me m’a répondu qu’elle était chaude… avant d’ajouter que son homme serait là.

Par le passé, j’ai déjà critiqué le mec d’une amie dans une nouvelle. Mec qui, par malheur, l’a lue et qui, par double malheur, a pensé que ce n’était pas de la fiction et qui m’en veut encore terriblement. Sale histoire entre potes. Alors, par mesure de précaution : comme la parenthèse précédente l’indique, ceci est une version « Lamoinsbonnedetescopines » de ma vie et si, évidemment, quelques éléments la représentent réellement, la plupart sont extrapolés, car parler de la seule levrette que j’ai eue en six ans ne serait pas très intéressant et il faut bien que l’écriture me permette de fantasmer des détails (#tournevis). Toujours est-il que, dans la réalité, son mec est un ami mais que, dans cette version, même s’il en restera un, je le décrirai comme une merde qui me vole ma pote en vacances alors que je voulais passer ma semaine à critiquer les hommes.

On est partis tous les trois. Tous les trois… plus les trois chiens. Les cousins de Gégé qui ne l’aiment pas vraiment et lui font un peu la misère. Un plaisir pour nous deux, donc.

Et si l’entente se passait plutôt bien, tout a basculé à l’instant où j’ai compris que ma meilleure amie était folle amoureuse de son homme. Ce n’était pas vraiment une grande nouvelle. Ça fait des années qu’ils sont en couple, qu’ils habitent ensemble, qu’ils sont parents de deux boules de poils, et donc qu’ils s’aiment. Mais là, ils se dévoraient. Au sens propre. À peine dans la voiture, je les voyais se toucher les mains, se jeter des regards et se sourire alors même que je parlais de ma rupture avec mon non-mec. Ils osaient. Ils osaient se courtiser tandis que je me confiais sur mes échecs.

Au fil des jours, rien ne s’est arrangé. Ils roucoulaient. Au sens propre. Je les entendais glousser comme des dindes, se taquiner… Un jour, alors que j’étais assise sur le canapé (le fameux), sous le plaid (toujours le fameux), je me suis sentie de trop. Parce qu’autour de moi, l’un du côté gauche, l’autre du côté droit, ils se couraient après. Le jeu semblait simple : « Cours avant que je t’attrape ». Si je n’avais pas été là, leur jeu se serait probablement terminé en fou rire avec la bite du mec de ma pote dans sa bouche. Mais j’étais là. J’étais là au milieu, les voyant tourbillonner autour du canapé, en hurlant et en rigolant comme des connards, leurs deux chiens les poursuivant à leur tour. La famille parfaite. Ils me faisaient un remake de la famille parfaite.

Parfois, ils avaient un autre jeu. Celui des chatouilles-bisous. Comme des gamins de cinq ans, en plein milieu d’un film. Lui commençait à la chatouiller, et elle, amoureuse, le suppliait d’arrêter en priant pour qu’il continue. À côté de moi, elle se tortillait et il lui soufflait dans le creux du ventre avant qu’elle explose de rire. Pendant quinze minutes. Moi, j’étais toujours sous mon plaid, téléphone en main, à surfer sur Tinder pour répondre pour la 52e fois : « Ça va et toi ? Quoi de beau ? »

Le pire, c’était encore les discussions.

Celles où ils essayaient d’être gentils et de m’écouter. Celles où, devant leur niaiserie, je n’avais qu’une envie : tomber amoureuse, renvoyer un message à l’homme qui ne voulait toujours pas de moi, me faire souiller comme une merde physiquement et mentalement (quand je dis « physiquement », je parle de ces fois où il m’a bloquée contre un mur et baisée comme une chienne ; en revanche, sur le « mentalement », je parle de ces fois où… bon vous savez très bien, malheureusement). Le pire, c’était ces discussions, quand ils voulaient me prouver que « Non, j’te jure, c’est cool d’être célibataire » alors même qu’ils ont vécu un quart de leur vie ensemble.

Les journées étaient longues, et les nuits encore plus. Car, une fois les chatouilles terminées devant le film, on partait dormir. Enfin, je partais dormir. Eux, ils commençaient une nouvelle activité. Pendant une bonne heure, je les entendais changer de position et écumer le Kamasutra, qui devait probablement être leur livre de chevet tant ils paraissaient le connaître.

Après cinq jours ensemble, moi portant une chandelle de la taille d’un lampadaire, je les ai quittés pour me retrouver seule dans ma voiture avec mon chien borgne. Pendant trois heures, j’ai roulé en me promettant de ne plus jamais partir avec un couple en vacances. Pendant trois heures, j’ai roulé en souhaitant que le reste de mes journées loin de chez moi ne me rappelleraient pas la tristesse que je venais de vivre parce que je m’étais fait larguer par l’homme que j’aimais. Pendant trois heures, j’ai roulé… avant d’arriver dans ma maison de vacances, accueillie par mes parents qui, directement, alors que j’étais encore dans ma voiture, que je venais simplement de baisser ma fenêtre pour les saluer, ont attaqué par un « Nono, bonne nouvelle, y a un nouveau voisin, super mignon, on l’a invité à manger ce soir ». Finalement, avec mes potes, ce n’était peut-être pas le pire.

C’est ce que j’ai compris, ce jour où je suis partie en vacances avec un couple.