La Moins Bonne de tes copines

Ce jour où je n’ai pas choisi entre Pile et Face

bkg B Club

Lundi 5 août 2024, ou peut-être mardi 6 août 2024. Un de ces jours durant lesquels j’étais censée me reposer alors que mon cerveau ne voulait pas s’arrêter. Il faut dire que pendant l’été 2024, il avait de quoi bouillonner.

D’abord, parce que cela faisait quelques semaines que ma nouvelle saga, Le Titre, était sortie. Puis, parce que l’oracle L’Esperluette, lié à cette saga, allait lui aussi prendre vie en septembre. Tant d’événements qui m’offraient la joie d’avoir mes neurones en éveil. Pourtant, mon cerveau, il était déjà ailleurs. Il était déjà dans le futur. Il était déjà en train de penser à la suite. 

La suite, il la voyait double. Et je m’en souviens parfaitement. Comme un éclair de génie, sans prendre conscience des conséquences, j’ai eu cette idée bien ambitieuse, un peu folle, mais – j’en étais sûre – brillante. En toute humilité, bien sûr. À cet instant, j’ai su : il y aurait deux tomes 2.

Pour vous refaire le contexte, et pour les rares gueuses qui n’ont peut-être pas encore lu Le Titre (shame on you comme dirait Ophélie), le roman se termine sur un choix. Sans vous spoiler (bien que j’en aie très envie pour vous punir de votre manquement), Coralie, l’héroïne, reçoit un texto à la fin du livre. 

Un texto dont elle ne connait ni l’expéditeur ni le numéro. Un texto qui doit forcément venir de l’un des trois hommes qui ont récemment partagé sa vie. Un texto qui lui dit : « J’ai besoin qu’on parle. Tu me manques, on peut se revoir ? » Un texto d’enculé, donc. Mais un texto d’enculé inconnu.

Coralie se trouve figée : impossible de savoir si elle doit répondre ou non. Heureusement pour elle, elle a l’habitude de se faire aider par l’univers, univers qui, dans sa vie, prend la forme d’une pièce qu’elle nomme la Pièce du Destin et qui a un rôle : lui indiquer un choix quand elle hésite. C’était le cas devant ce message. Alors, elle a attrapé sa Pièce du Destin : « Pile, je réponds, face, je l’ignore… »

Vous le voyez venir, mon cerveau hyperactif ? C’était une certitude : il fallait que les deux histoires existent. C’est ainsi que durant l’été 2024, je me suis fait la promesse de réussir à sortir deux romans, Pile et Face, en juin 2025.

Après quelques jours de repos, bien sûr passés à réfléchir à mes deux livres à venir, je m’y suis plongée. Le plus difficile, c’était évidemment de trouver le scénario.

Car la subtilité, et encore une fois sans rien vous spoiler, c’était que le dénouement des deux livres devait être le même. L’idée, c’était d’illustrer la force de la fatalité. Ce qui doit arriver arrive toujours, et c’est ce que je tenais à souligner. En d’autres termes : je voulais deux histoires différentes, avec une fin identique pour prouver que peu importe le chemin, on vit ce qu’on doit vivre. 

Si sur le principe, c’est poétique, dans la pratique, c’est beaucoup plus compliqué. Je me suis dans un premier temps attaquée au scénario. J’ai posé sur papier mes idées et surtout mon vécu. Ne nous mentons pas, mes œuvres sont tirés de faits réels. 

Plus ou moins. Heureusement pour moi, la vie ne m’épargne pas et m’offre de l’inspiration à foison. Histoires d’amour, d’amitié, de loyauté et de trahison. De quoi faire une jolie intrigue. Ou deux. J’ai noté les trames, les ai reprises, effacées, j’ai écrit de nouveau et fait coïncider les deux. Et, pour ajouter de la difficulté, j’ai laissé des indices dans chacun des romans. Je voulais que Face parle à Pile et que Pile parle à Face. Je voulais que mes lectrices, une fois les deux livres dévorés, comprennent l’impact de cette petite décision sur la vie de mon héroïne. Je voulais l’effet papillon, et il n’était pas si simple à avoir.

Après trois mois de rédaction intensive, les premiers jets des deux romans étaient bouclés.

Après trois mois de rédaction intensive, les premiers jets des deux romans étaient bouclés. J’avais réussi. En tout cas, c’est ce que je croyais.

Parce qu’évidemment, ce n’était pas fini. Le plus dur, ou presque, était encore à venir : les relectures. Les relectures, tu les attends autant que tu les redoutes. Car d’un côté, elles annoncent la fin de l’écriture et donc une sacrée tonne de travail terminé, mais elles signifient également qu’il reste beaucoup à faire. Les relectures, c’est le milieu de l’aventure, et cette étape est aussi agréable que laborieuse. Là, tu doutes. Tu vois les fautes, les lourdeurs, les phrases mal tournées, les chapitres pas assez développés, et tout ce qui peut ne pas plaire. Dans ma tête, j’ai fini par me dire que j’aurais dû ne faire qu’un livre, que c’était assez compliqué et que ça aurait été bien suffisant. Constamment, je les comparais : est-ce que l’un était meilleur que l’autre ? Et si oui, pourquoi ? Que pouvais-je faire ? 

À ce moment, tu ne peux plus abandonner et pourtant, tu le voudrais presque. Moi, j’en avais déjà marre de les relire alors que je ne l’avais fait qu’une fois, de devoir traquer les incohérences et de faire en sorte de les parfaire. Mauvaise nouvelle : j’avais, en plus, double travail. Pour écrire deux livres qui fonctionnent ensemble, il faut faire preuve d’une grande vigilance, vigilance que j’espère avoir réussi à avoir. Pendant des semaines, je me suis retapé mes œuvres, encore et encore, jusqu’à ne plus les supporter. C’est classique, chaque année, et c’est souvent bon signe. Parallèlement à ça, je travaillais la couverture, le marketing, la communication et tout ce que je pouvais faire naitre en rapport avec ce nouvel univers qui allait prendre vie.

C’était colossal. C’était colossal et c’était en double. Mais je ne regrettais rien. Parce qu’à quelques jours de la sortie, couvertures terminées, livres brochés et histoires prêtes à être lues, j’ai su.

J’ai su que l’idée allait vous faire vriller, que vous alliez adorer pouvoir découvrir deux scénarios, que vous alliez vouloir les dévorer et que j’avais eu raison (de me casser le cul). J’ai su. J’ai su que Pile et Face allaient être des succès, grâce à vous, grâce à moi, grâce à ceux qui m’ont aidée, grâce à ceux qui m’ont inspirée en me blessant ou m’aimant, grâce à nous tous.  

Puis, il est arrivé, ce jour de sortie. Ce jour où vous lisez peut-être cette nouvelle. Il est arrivé, ce moment où vous pouvez commander mes deux nouveaux bébés, pour les dévorer ou les laisser six mois sur votre table de chevet, ce moment où vous allez les partager à votre collègue préférée ou avoir honte d’en parler.

Il est arrivé, ce moment où mes livres ne m’appartiennent plus. Il est arrivé, ce moment où ils sont devenus vôtres. C’est maintenant, ce jour où je n’ai pas à choisir entre Pile et Face… et vous non plus !

Merci du plus profond de mon âme de les faire vivre. Cette histoire, c’est la mienne. C’est peut-être la vôtre. Mais c’est sans aucun doute la nôtre. Merci encore.