La Moins Bonne de tes copines

Ce jour où j’ai décidé d’acheter une maison

bkg B Club

Mardi 6 juin 2023. Ou jeudi 14 novembre 2024. Ou vendredi 21 2025. Tant de jours pour un seul objectif : acheter une fucking maison. Si l’endroit où je vis actuellement est plutôt sympathique, il n’empêche que les 1 000 balles de loyer qui partent dans les poches de mes propriétaires déjà blindés au lieu de partir dans les poches de mon banquier déjà blindé sont difficiles à accepter. Pourtant.

Pourtant, c’est mon chez-moi. Et c’est bien ça le piège. Car si depuis plusieurs années, j’économise dans l’espoir de pouvoir acheter, la réalité est que j’en suis loin.

Déjà, parce que mon chez-moi, il me plait. Et donc, il est évidemment compliqué d’imaginer quitter un logement que l’on aime pour un logement que l’on ne connait pas. Le fameux : « L’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs. » L’herbe, moi, je l’aime pas. Dans ma maison actuelle, le jardin, il est tout petit, et c’est parfait. Ce que je veux dire, c’est que cette maison correspond (presque) à tous mes besoins. Elle est très bien située, me permettant de profiter aussi bien de ma vie personnelle que professionnelle, à l’exception peut-être de ma vie amoureuse. Soyons honnêtes : il serait bien plus simple de dater la gent masculine de ma came en habitant place de la République dans le centre de Paris. Et encore, c’est à prouver. Pour avoir vécu plusieurs années dans le 19e, je sais que cela n’assure en rien des trifouillages de clitoris par des mains forcément moins habiles que les miennes, à mon grand désespoir.

Même si mon voisin s’appelle Gérard, que je suis entourée de familles plus que de jeunes célibataires aux abdos développés et que la forêt me voit plus régulièrement que les terrasses de café, je suis heureuse là où j’habite. Voilà donc pourquoi, trois ans après avoir commencé à chercher, je n’ai toujours pas bougé.

Il faut avouer qu’outre le fait que je suis bien chez moi, il y a un autre argument massif à mes craintes de déménagement : je suis seule. Et lorsque je dis que je suis seule, je ne parle pas de mon petit cœur très souvent célibataire. Je parle bien de mon compte bancaire qui se dilapidera par dizaines de milliers d’euros en solitaire. Acheter une maison pour la première fois, ça fait peur. Acheter une maison pour la première fois en solo, c’est effrayant. Évidemment, j’ai la chance d’être entourée, notamment de mes parents qui, dans une autre vie, ont certainement été Stéphane Plaza. Oui, la référence est malvenue, parce que Stéphane, c’est quand même un enculé qui a battu sa femme. Certes. Mais connaissons-nous une autre référence en matière d’immobilier ? Eh bien, non.

Ainsi, si tu es toi-même dans le biz, merci de vite proposer ta candidature à M6 pour nous faire oublier ce connard et devenir la nouvelle réf. 

Mes parents, donc, ils aiment acheter, revendre, rénover, chercher des baraques dans des lieux où ils ne sont jamais allés et surtout, me motiver à, moi aussi, investir. Depuis des mois, je les entends me recommander de passer le cap, parce que « c’est bête d’avoir un apport, de payer un loyer et de perdre de l’argent ». Oui, maman, c’est vrai. Mais moi, je paye également mon confort, la non-charge mentale et le luxe de ne pas me prendre la tête avec un achat. C’était en tout cas ce que je pensais il y a encore quelques semaines.

Jusqu’à la révélation, que vous connaissez peut-être vous aussi. Noholito. James, l’un de mes amis qui, fin d’année 2024, a acquis une superbe maison que j’ai pu visiter en décembre. James, il n’a pas eu peur et il a foncé. En le quittant, j’ai puisé en lui le courage qu’il a eu d’acheter seul, sans se poser trop de questions, sans crainte de faire une erreur. C’était ça qui me manquait. Me jeter à l’eau. Moi qui, habituellement, me lance à corps perdu dans des projets complètement improbables dans ma vie pro, je paniquais dans ma vie perso. 

De retour chez moi, début 2025, j’étais décidée : cette année, j’allais déménager et surtout, j’allais acheter ma maison. Ainsi, je me suis retrouvée sur toutes les applications, les sites de petites annonces et autres sources pour trouver un bien. Parallèlement, j’ai contacté mon expert-comptable en serrant les fesses à l’idée de voir mes économies partir, et mon banquier en serrant les fesses à l’idée que ma demande de crédit soit refusée. Pourtant, tout s’est aligné. Les simulations étaient bonnes et tous les feux étaient au vert. Pour une fois depuis plusieurs semaines, j’en avais envie, vraiment. Je m’imaginais dans cette nouvelle maison et j’ai carrément fini par ne plus aimer celle dans laquelle je vivais. Je constatais ses défauts, rêvais d’une chambre en plus dans laquelle je rangerais mes livres telles des œuvres d’art, d’un salon dans lequel trônerait une grande table où je pourrais préparer mes commandes ou d’une salle de bain supplémentaire pour accueillir mes proches aisément. 

Comme à mon habitude, je suis devenue complètement obsessionnelle, à regarder toutes les cinq minutes les annonces en espérant y trouver mon bonheur et en commençant même à visiter.

Motivée comme jamais, j’avais presque le stylo en main pour signer après la première maison, bien qu’elle soit trop chère et qu’elle ne me corresponde pas vraiment. Je ne voyais que le positif, en me mentant sur le négatif. En réalité, je savais bien qu’elle ne me plaisait pas. Déjà, le voisin pouvait littéralement me regarder me masturber dans mon lit s’il se mettait à sa fenêtre. Et puis, les chiottes étaient un bidet des années 50. Enfin, les murs du salon étaient recouverts de bois, bois qui avait pris l’humidité et qui sentait le renfermé. Mais tout ça, je l’occultais alors que j’étais toujours très claire sur un point : je ne voulais pas faire de travaux. Néanmoins, à cet instant, rien ne semblait être un problème. La chambre mansardée qui m’empêchait de me tenir droite ? Pas un problème. Le garage trop petit même pour un scooter ? Pas un problème. Le voisin aux lunettes en cul de bouteille probablement tueur d’enfants ? Pas un problème. 

Heureusement pour moi, j’avais Stéphanie Plazo à mes côtés, alias ma mère. Elle, elle laissait rien passer et savait me raisonner. C’est ainsi que pendant les premières semaines de 2025, j’ai continué mes recherches en faisant de cet achat ma priorité de l’année. Dans l’univers, j’ai mis les bonnes ondes, celles qui me permettraient de trouver un chez-moi comme je l’imaginais, avec ses imperfections qui ne m’empêcheraient tout de même pas de vivre, dans un lieu que j’aimerais et où je me sentirais en sécurité, dans un petit cocon qui, pour la première fois, serait vraiment le mien. C’est en tout cas ce que je me suis souhaité. C’est en tout cas ce que j’ai voulu, ce jour où j’ai décidé d’acheter une maison.